L'Europe, une construction à administrer comme une grande copropriété

Publié le par Océ

"L'enlèvement d'Europe" par Véronèse.

"L'enlèvement d'Europe" par Véronèse.

   En ces temps de dénigrement systématique qui évite de voir les aspects positifs, il est de bon ton de crier contre l'Europe des technocrates et du libre-échange.

   Et pourtant... L'Union européenne est un superbe rêve, voire une utopie depuis longtemps. La preuve ? un extrait du discours de Victor Hugo au Congrès de la Paix de Paris :

«Un jour viendra où les armes vous tomberont des mains, à vous aussi !

  Un jour viendra où la guerre paraîtra aussi absurde et sera aussi impossible entre Paris et Londres, entre Pétersbourg et Berlin, entre Vienne et Turin, qu'elle serait impossible et qu'elle paraîtrait absurde aujourd'hui entre Rouen et Amiens, entre Boston et Philadelphie.

  Un jour viendra où la France, vous Russie, vous Italie, vous Angleterre, vous Allemagne, vous toutes, nations du continent, sans perdre vos qualités distinctes et votre glorieuse individualité, vous vous fondrez étroitement dans une unité supérieure, et vous constituerez la fraternité européenne, absolument comme la Normandie, la Bretagne, la Bourgogne, la Lorraine, l'Alsace, toutes nos provinces, se sont fondues dans la France.

  Un jour viendra où il n'y aura plus d'autres champs de bataille que les marchés s'ouvrant au commerce et les esprits s'ouvrant aux idées.

  Un jour viendra où les boulets et les bombes seront remplacés par les votes, par le suffrage universel des peuples, par le vénérable arbitrage d'un grand sénat souverain qui sera à l'Europe ce que le parlement est à l'Angleterre, ce que la diète est à l'Allemagne, ce que l'Assemblée législative est à la France.Un jour viendra où l'on montrera un canon dans les musées comme on y montre aujourd'hui un instrument de torture, en s'étonnant que cela ait pu être. »

    C'était le 21 août 1849.  Discours  lyrique et optimiste comme toujours avec  notre grande figure du panthéon littéraire et politique.  Pair de France d'abord conservateur,  Hugo a été  élu à l'Assemblée législative et son combat ne se limitera pas à  s'opposer de plus en plus à Napoléon III.  

    Le XXème siècle lui donnera cruellement raison et offrira  la preuve par le contraire, l'absurde et l'horreur :  l'Europe va  être ravagée humainement, moralement et économiquement par deux grandes guerres mondiales provoquées par des nations européennes.  Mais c'est le XXème siècle  qui  va tenter de mettre en place  une solution prônée  cent ans plus tôt.

    Et au XXIème siècle, voilà que certains veulent détruire  cette construction qui nous a valu des décennies de paix. Bien sûr, les critiques sont nombreuses et justifiées, mais cela vaut-il la peine de rejeter l'ensemble, d'accuser parfois à raison mais aussi à tort, d'oublier la beauté du projet initial ?

    Et si l'on considérait l'Europe actuelle comme  une vaste copropriété avec son règlement qui gère l'ensemble ? Tout copropriétaire sait qu'il est facile de râler contre les charges, contre les votes de la majorité à l'Assemblée générale annuelle. Mais ces contraintes imposées par le choix d'entrer dans une copropriété ont l'avantage de prendre en compte l'intérêt  général. Le ravalement, l'entretien des espaces verts, la gestion des déchets  protègent la valeur du bien personnel  dont chacun  garde la maîtrise, personne ne vous imposant la couleurs des murs de votre salon.

  Et puis, si le syndic en place ne plaît pas, on applique la loi Alur et on met en concurrence avec d'autres syndics. Personne n'a  l'idée de dynamiter la copro !

 

 

 

 

 

Publié dans Société, Littérature

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