Le "Monstre Opinion" à nouveau lâché
Notre présent ? Grosse dépression centrée sur l'hexagone comme le disait si bien Ronsard :
«Las! (…) en ce temps que le cruel orage
Menace les Français d'un si piteux naufrage,
Que la grêle et la pluie, et la fureur des cieux
Ont irrité la mer de vents séditieux (...)"(1)
Quand le temps inquiète, on regarde le ciel et ce qu'il annonce en espérant le retour au beau temps annonciateur de bonnes récoltes. Bref, on pense toujours au futur plus ou moins proche.
Début 2019, force est de constater que l'on doit se poser la question de la place de l'horizon. Pour rappel, le terme désigne la "ligne circulaire où la terre et le ciel semblent se rejoindre et qui limite le champ visuel d'une personne en un lieu ne présentant pas d'obstacle à la vue." (Cntrl)
Cette première définition du mot horizon correspond à l'image d'illustration du billet et au sens premier habituel du mot.
En lisant la presse, on songe immanquablement à la pensée supposée dominante depuis deux mois "qui limite le champ visuel" en le propulsant vers l'arrière. Chacun peut ainsi se retrouver en 1940 version lettres de dénonciation, en 1918 pendant la Révolution russe et, surtout, en 1789 et suivantes avec son cortège de têtes sur des piques ou dans des paniers d'osier au pied de "la veuve". Autant dire dans un passé lointain et fort peu engageant.
Osons donc repousser les limites visuelles et mentales. En arrière toute, droit vers le XVIème siècle, bien sanglant lui aussi avec ses huit "guerres de religion" qui opposaient catholiques et réformés. Les exactions des uns ont régulièrement répondu aux exactions des autres, chaque parti, fort de son bon droit, faisant porter tous les torts sur l'autre.
Évoquées par Ronsard, les "misères" de la France ravagée par les divisions sont causées par ce qu'il nomme "le monstre Opinion" :
"Ce monstre arme le fils contre son propre père,
Et le frère, ô malheur, arme contre son frère,
La sœur contre la sœur, et les cousins germains
Au sang de leurs cousins veulent tremper leurs mains,
L’oncle fuit son neveu, le serviteur son maître,
La femme ne veut plus son mari reconnaître.
Les enfants sans raison disputent de la foi,
Et tout à l’abandon va sans ordre et sans loi.
(...)
Morte est l'autorité; chacun vit en sa guise
Au vice déréglé la licence est permise ;
Le désir, l'avarice et l'erreur insensé
Ont sens dessus-dessous le monde renversé." (...) (2)
[1 et 2 : citations extraites du recueil de Ronsard, Discours des Misères de ce temps (orthographe légèrement modernisée)]