De l'ordi-arrosoir au pianocktail de Vian : réenchantons les objets

Publié le par Océ

  Utilité, nostalgie, décoration...chacun a sa bonne raison de s'attacher à tel ou tel objet caractéristique de la vie dans sa banalité quotidienne.

  Mais comment conjuguer ce goût avec l'omniprésence des technologies modernes ? On en trouve un nouvel exemple à la lecture d'un article de la presse quotidienne régionale, la si mal nommée PQR.

   Ouest-France présente ainsi le portrait d'un habitant de Crac'h (Morbihan). Sa spécialité ?  là où certains cherchent à battre des records de miniaturisation, lui a opté pour le détournement et la réutilisation des objets de tous les jours pour y placer des ordinateurs : un jerrycan, un tonnelet, un arrosoir en fer-blanc et même une jante... Soyons lucide : les innovations proposées ont un coût.

   En lien avec l'article et le beau temps propice aux rencontres amicales,  on se souviendra avec plaisir du fameux pianocktail de Boris Vian qui prête l'invention à Colin, le personnage principal de L'Ecume des jours .

 

 Grand amateur de jazz et musicien, Vian a donné ses goûts à son héros.

Grand amateur de jazz et musicien, Vian a donné ses goûts à son héros.

http://www.peintures-sur-toile.com/peinture-musique-3826-xml-356-1523.html

     A lire, cet extrait du roman  qui  présente le héros, Colin, en train de tester son invention pour son ami Chick :

« – Prendras-tu un apéritif ? demanda Colin. Mon pianocktail est achevé, tu pourrais l’essayer.
– Il marche ? demanda Chick.
– Parfaitement. J’ai eu du mal à le mettre au point, mais le résultat dépasse mes espérances. J’ai obtenu, à partir, de la Black and Tan Fantasy, un mélange vraiment ahurissant.
– Quel est ton principe ? demanda Chick.
– A chaque note, dit Colin, je fais correspondre un alcool, une liqueur ou un aromate. La pédale forte correspond à l’œuf battu et la pédale faible à la glace. Pour l’eau de Seltz, il faut un trille dans le registre aigu. Les quantités sont en raison directe de la durée : à la quadruple croche équivaut le seizième d’unité, à la noire l’unité, à la ronde le quadruple unité. Lorsque l’on joue un air lent, un système de registre est mis en action, de façon que la dose ne soit pas augmentée – ce qui donnerait un cocktail trop abondant – mais la teneur en alcool. Et, suivant la durée de l’air, on peut, si l’on veut, faire varier la valeur de l’unité, la réduisant, par exemple au centième, pour pouvoir obtenir une boisson tenant compte de toutes les harmonies au moyen d’un réglage latéral.
– C’est compliqué, dit Chick.
– Le tout est commandé par des contacts électriques et des relais. Je ne te donne pas de détails, tu connais ça. Et d’ailleurs, en plus, le piano fonctionne réellement.
– C’est merveilleux ! dit Chick.
– Il n’y a qu’une chose gênante, dit Colin, c’est la pédale forte pour l’œuf battu. J’ai dû mettre un système d’enclenchement spécial, parce que lorsqu’on joue un morceau trop « hot », il tombe des morceaux d’omelettes dans le cocktail, et c’est dur à avaler. Je modifierai ça. Actuellement, il suffit de faire attention. Pour la crème fraîche, c’est le sol grave.
– Je vais m’en faire un sur Loveless Love, dit Chick. Ça va être terrible.(...)


 

Publié dans Littérature, Musique

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