Chat vaut vraiment la peine
Pour les amis des livres et des chats, voici deux jolies façons de combiner leurs préférences et également de voyager dans le temps et l'espace.
- 2017 : Hiro Arikawa, Les Mémoires d'un chat (juin 2017, chez Actes sud Littérature)
Dans un délicieux livre teinté d'humour et de beaucoup de tendresse, un chat de gouttière raconte les péripéties de sa vie qui l'ont transformé en fin observateur des humains mais aussi en esthète (très jolies pages sur les champs de fleurs et sur le mont Fuji) et, aussi, en amateur d'imprévus comme l'expérience de la découverte de la mer ou du ferry boat.
Le lecteur découvre l'univers des villes et des campagnes japonaises en suivant les pérégrinations du chat baptisé Nana et de son maître Satoru. Il suit surtout l'histoire d'une étroite amitié, inattendue tant elle avait mal commencé et souvent poignante. On s'amuse aussi en découvrant comment le chat explique son comportement habituel, sa préférence pour la vieille boîte en carton ou pour les téléviseurs anciens.
L'ouvrage original étant en japonais, on lit le texte dans une traduction qu'on aime imaginer fidèle tant elle est claire et simple. Méfiance ! on est vite captivé par un récit qui est tout sauf anodin.
- 1844 : Balzac, Peines de cœur d'une chatte anglaise
On change d'époque et de pays mais avec autant de bonheur car on retrouve un narrateur félin qui offre ses mémoires et sa vision de la société anglaise. Balzac a adopté l'humour et le je-ne-sais-quoi assez distancié pour faire parler Beauty, son héroïne.
Un extrait, au hasard, celui de la rencontre de Beauty avec un spécimen mâle :
"Puff était, dans le beau monde des chats anglais, le plus riche parti pour une chatte née chez un ministre ; il avait deux valets à son service, il mangeait dans de la porcelaine chinoise, il ne buvait que du thé noir, il allait en voiture à Hyde-Park et entrait au parlement."
Les familiers de La Comédie humaine retrouveront le regard balzacien sur les travers de la société du temps et ceux de l'homme comme le montre une des premières leçons donnée à Beauty par sa maîtresse de la bonne société : "Beauty, tu pourras sacrifier les convenances avec d'autant plus de charme que tu te seras retenue en public. En ceci éclate la perfection de la morale anglaise qui s'occupe exclusivement des apparences, ce monde n'étant hélas ! qu'apparence et déception. "
Quelques informations complémentaires sur le texte :
Publiée dans le recueil Scènes de la vie privée et publique des animaux, la nouvelle est devenue un livret d'opéra signé Edward Bond sur une musique de Hans Werner Henze et la création de l'opéra date de 1983.
Des recherches en ligne font apparaître un certain nombre de spectacles donnés à partir de la nouvelle.
-"Le monde entier est un théâtre." (Shakespeare)